[Journal Club] Un nouveau catalyseur pour des réactions d’oxydation plus vertueuses
Des chimistes parisiens démontrent que des réactions d’oxydation peuvent être effectuées dans des conditions douces en utilisant une source d’atomes d’oxygène propre et renouvelable (H2O), la lumière visible comme source d’énergie et un métal non noble et abondant comme catalyseur (fer).
Pour réaliser des réactions d’oxydation, on utilise généralement des oxydants nocifs ou toxiques en travaillant à haute température et haute pression. Inspirés par des processus d’oxydation naturels, les chercheurs de l’Institut de chimie moléculaire et des matériaux d’Orsay (CNRS / Université Paris-Sud) ont mis au point un système catalytique utilisant une source d’atome d’oxygène propre et renouvelable (H2O) comme oxydant, la lumière visible comme source d’énergie, un métal non noble et abondant (fer) comme catalyseur, et qui permet d’effectuer la réaction d’oxydation à pression atmosphérique et température ambiante. Ces résultats font l’objet d’un article dans la revue Chemical Science.
Dans l’industrie comme dans les laboratoires de recherche, les méthodes couramment utilisées en synthèse chimique pour réaliser des oxydations de molécules organiques reposent sur l’emploi d’oxydants (CrO42-, MnO4–, S2O82-…) nocifs ou toxiques, et s’accompagnent souvent de conditions dures (hautes température et pression). Au contraire, dans le milieu naturel, on constate que des métalloenzymes sont capables de catalyser ces réactions d’oxydation en activant des petites molécules « propres » et renouvelables comme le dioxygène ou l’eau (O2 ou H2O). Leurs sites actifs sont constitués de métaux non nobles comme le Fer ou le Manganèse, donc peu coûteux. L’intérêt est croissant pour ces catalyseurs naturels étant donnée leur capacité à effectuer ces réactions difficiles dans des conditions douces (température ambiante et pression atmosphérique). De nombreuses équipes de recherche développent actuellement des travaux visant à imiter l’activité de ces catalyseurs naturels dans le but d’effectuer des réactions d’oxydation de manière plus vertueuse.L’appareil photosynthétique des plantes capte la lumière solaire puis convertit l’énergie lumineuse en énergie chimique qui dissocie l’eau pour donner un atome d’oxygène, des électrons et des protons. Ces électrons et protons sont utilisés pour la production de molécules riches en énergie et par la même contribuent à la croissance de la plante. L’atome d’oxygène se retrouve quant-à-lui sous la forme d’une espèce métal-oxo à haut degré d’oxydation (donc très oxydant), qui va pouvoir ensuite oxyder l’eau pour donner le dioxygène.
Inspirés par ces processus, les chercheurs ont préparé un système synthétique couplant un chromophore (complexe de ruthénium) à un catalyseur d’oxydation (complexe de fer) (Voir figure). L’irradiation par la lumière visible active le chromophore qui déclenche une série de transfert d’électrons et de protons pour activer la molécule d’eau liée au fer et générer une espèce fer-oxo FeIV(O) (Voir figure). Cette espèce fer-oxo est alors capable d’oxyder un substrat comme le fait l’appareil photosynthétique.
Référence: Christian Herrero, Annamaria Quaranta, Marie Sircoglou, Katell Sénéchal-David, Aurélie Baron, Irene Mustieles Marín, Charlotte Buron, Jean-Pierre Baltaze, Winfried Leibl, Ally Aukauloo, and Frédéric Banse “Successive Light Induced Two Electron Transfers in a Ru-Fe Supramolecular Assembly: from Ru-Fe(II)-OH2 to Ru-Fe(IV)-Oxo” Chemical Science 26 janvier 2015 DOI: 10.1039/C5SC00024F
Contact chercheur: Frédéric Banse, Institut de chimie moléculaire et des matériaux d’Orsay, , Tél. : 01 69 15 78 21